Dérive d’octobre

Photo : Celles que j’appelle des fleurs lanternes orange (octobre 2021). Elles me plaisent.

 

À propos de ma photo en-tête d’article

Ce sont des petites fleurs devant lesquelles je passe trois fois par semaine, en courant, sur mon parcours de course. Elles sont apparues il y a un mois à peu près, au bord du chemin. Il n’y a qu’un tout petit arbuste, seul au milieu d’autres fleurs, jaunes, que je ne peux plus voir. Celles-ci sont différentes. Elles se cachent. J’ai dû m’y reprendre à deux fois hier matin en venant à vélo pour les photographier. Je ne les retrouvais plus, comme si elles avaient disparu. Ça m’a fait une angoisse parce que l’idée m’était venue dans la nuit, pendant que je fumais des clopes dehors devant l’entrée des urgences pédiatriques sous un rideau de pluie qui tombait sans discontinuer, que c’était ces fleurs lanternes orange que je voulais pour ma photo d’octobre et rien d’autre. (Le réveil à 3h30 du matin par un de tes enfants qui n’arrive plus à respirer est toujours un bon plan pour te rappeler d’apprécier les jours et les nuits où, finalement, il ne se passe rien. Enjoy.)

Pour ces fleurs que je désirais tellement, je suis revenue en arrière. J’ai ouvert plus grand mes yeux et je n’ai rien vu. J’ai posé mon vélo contre un mur en pierre et j’ai refait le trajet en marchant, le cœur battant. C’était long, j’ai pris la pluie encore et je me suis dit que peut-être c’était fini, qu’elles avaient fané, ou bien même, que peut-être je les avais rêvées et que je ne les retrouverais plus, quand, enfin, elles me sont apparues.

 

Au bord de mon chemin.

 

Le soulagement soudain, comme si on m’enlevait un poids, la joie !

Non je n’avais pas rêvé, et non elles n’avaient pas complètement fané.
Quand je suis rentrée chez moi, j’ai transféré les photos de mon appareil sur mon ordi, puis j’ai tapé « fleurs lanternes orange » dans Google pour savoir quoi vous écrire dans la légende. C’est alors que, en cliquant sur le premier lien dont la photo ressemblait trait pour trait aux miennes, je suis tombée sur la définition suivante :

L’alkékenge, ou amour en cage, est une plante ornementale à la fructification particulièrement originale.

Ma curiosité floricole ayant été coupée net au début de l’été, je n’ai pas cherché à savoir comment se manifestait cette intrigante originalité. C’est même malgré moi que j’ai lu ensuite que cet amour en cage, on pouvait aussi l’appeler : lanterne japonaise.
Malgré moi l’écho de ces fleurs à mon voyage, aux grandes révélations que j’ai eues au Japon. Ce qu’on fera et ce qui sera fait.

 

Elles se cachent. Elles veulent que je les voie dans tout leur éclat et après je ne les retrouve pas. Elles se fissurent et se flétrissent, et puis elles tombent.

 

Comme je vous l’annonçais dans mon premier article de l’année (relisez-le, j’ai tout donné pour celui-là* ; mes prochains articles ne seront que succédanés à faible densité nutritionnelle !), je vous propose de célébrer les 3 ans d’existence de mon blog par un rappel des articles parus le même mois pour chaque année écoulée.

(* C’est pas tout à fait vrai… J’ai beaucoup donné aussi pour celui-ci et encore plus pour celui-là.)

 

Quand je pense octobre, je pense automne, potimarron, feuilles mortes, humidité, déprime.

Mais cette année j’ai décidé de ne pas vous assommer avec ma dépression d’octobre. Nan parce que ça va quoi. En plus je sais exactement ce qui m’allègerait, ce qui ferait de ma vie une fête et de chaque matin un sourire au réveil.

En attendant, quand je sens que je m’assombris, que de n’avoir pas sincèrement souri j’entasse les briques dans mon estomac, je branche SML. SML pour Sophie-Marie Larrouy et son podcast À bientôt de te revoir.

Cette fille remplace le Xanax et le Lexomil si, il y a très longtemps, tu as décidé que tu arrêtais tout ça mais que, quand même, des fois tu te dis que t’en prendrais bien un petit. Par exemple la nuit dernière, pendant que tu fumais des clopes dehors devant l’entrée des urgences pédiatriques sous un rideau de pluie qui tombait sans discontinuer, blablabla.
Peut-être que ça fait ça aussi avec la cigarette pour les gens qui ont arrêté de fumer d’ailleurs, mais comme moi j’ai jamais arrêté je peux pas savoir.

Enfin. SML donc. À qui j’adresse ici toute ma reconnaissance et ma solidarité en journées (et nuits) pourries. Parce que la gravité n’est pas obligatoire. Parce qu’on peut rire de presque tout. Parce que la fête c’est dans la tête et que moi aussi l’ASMR ça me casse les nuts.
En une heure elle me redonne le sourire. C’est pas précieux, ça ?

 

Attention quand même, si je vous ai donné irrésistiblement envie d’écouter un épisode de À bientôt de te revoir parce que vous aimez ce que j’aime vous êtes un(e) ouf dans votre tête : il faut que vous sachiez que Sophie-Marie Larrouy est une vraie (de vraie) déglingo !
Mickaël est fan (et après on dit que c’est moi la déglinguée). J’dis ça j’dis rien.

 

Vidéo : Sophie-Marie Larrouy / Konbini, mai 2021.

 

Où vous apprenez que c’est 80 € les 4,5 litres d’huile d’olive dans la petite épicerie fine des Abbesses quand vous pouvez payer 37 € le bidon de 5 litres d’huile d’olive artisanale du papa de Marlou en passant par moi ou par la boutique de Marlène ! De nouveau, j’dis ça j’dis rien…

J’ai trouvé cette vidéo Konbini sur YouTube en préparant mon article et c’était la première fois que je voyais physiquement SML, pas seulement écouter sa voix. J’adore.

SML c’est la fille qui demande, au moment où je publie mon article Gingembre de septembre :

« Quel est le rapport entre le gingembre dans la vinaigrette et le polyamour ? »
(Podcast À bientôt de te revoir, épisode « Best of #3 Love ».)

SML c’est la fille qui ose dire (dans le même épisode) :

« Ça me vénère à chaque fois que j’entends des histoires de gens qui ont ken pour la première fois avec quelqu’un qu’ils aimaient, ambiance pétales de roses et Toto qui chante Africa ! »

Mais tellement !!! Je bats des mains, je hoche la tête à toute vitesse les yeux écarquillés, je plussoie à haute voix toute seule dans ma cuisine :

Mais grave ! Moi aussi ça me vénère Sophie-Marie, les gens j’ai envie de les taper !

SML c’est la fille qui répond à la question existentielle de pour quoi on est là en fait, sur Terre ? En deux verbes : pour rire et manger !
Voyez ? C’est joyeux après, on n’a plus envie de déprimer.

 

 

Rire et manger. Marcher. Aimer surtout.

Pour octobre, il me fallait un poète qui soit tout cela. Un esprit vif et indiscipliné, pas un mélancolique recroquevillé qui pleure sur le bel amour qu’il ne vivra jamais ailleurs que dans son idéal mais, au contraire, un romantique fougueux et audacieux qui donne du corps à ses rêves. De la tripe.

Il me fallait un joyeux boucher. Un qui touche à tout, qui a vécu mille vies à fond, sous mille noms, un faux snob, un vrai pur. L’arrache-cœur de mon adolescence, celui qui conseillait de déserter et de ne pas nous marier, les filles. Celui qui crachait sur vos tombes.
Allez Boris, fais-moi encore du bien.

 

Boris Vian est très jeune sur cette photo, 15-16 ans. Étonnamment androgyne aussi, mais au moins sur celle-là il ne ressemble pas à Macron. Sinon ça me fout trop les boules !

 

Le poème que j’ai choisi ouvre le recueil auquel il donne aussi son titre : Je voudrais pas crever. Ce recueil, publié par Jean-Jacques Pauvert en 1962 (donc après la mort de Boris Vian), rassemble 23 poèmes écrits en 1951 et 1952. Il m’a été offert il y a au moins dix ans par « la copine de papa », disent les enfants, avec une dédicace personnelle.

Je voudrais pas crever
Avant d’avoir usé
Sa bouche avec ma bouche
Son corps avec mes mains
Le reste avec mes yeux.

Merci Célia, sans me connaître, d’avoir vu aussi juste.

 

 

Boris Vian, Je voudrais pas crever, 1952.

Je voudrais pas crever
Avant d’avoir connu
Les chiens noirs du Mexique
Qui dorment sans rêver
Les singes à cul nu
Dévoreurs de tropiques
Les araignées d’argent
Au nid truffé de bulles
Je voudrais pas crever
Sans savoir si la lune
Sous son faux air de thune
A un côté pointu
Si le soleil est froid
Si les quatre saisons
Ne sont vraiment que quatre
Sans avoir essayé
De porter une robe
Sur les grands boulevards
Sans avoir regardé
Dans un regard d’égout
Sans avoir mis mon zobe
Dans des coinstots bizarres
Je voudrais pas finir
Sans connaître la lèpre
Ou les sept maladies
Qu’on attrape là-bas
Le bon ni le mauvais
Ne me feraient de peine
Si si si je savais
Que j’en aurai l’étrenne
Et il y a z aussi
Tout ce que je connais
Tout ce que j’apprécie
Que je sais qui me plaît
Le fond vert de la mer
Où valsent les brins d’algues
Sur le sable ondulé
L’herbe grillée de juin
La terre qui craquelle
L’odeur des conifères
Et les baisers de celle
Que ceci que cela
La belle que voilà
Mon Ourson, l’Ursula
Je voudrais pas crever
Avant d’avoir usé
Sa bouche avec ma bouche
Son corps avec mes mains
Le reste avec mes yeux
J’en dis pas plus faut bien
Rester révérencieux
Je voudrais pas mourir
Sans qu’on ait inventé
Les roses éternelles
La journée de deux heures
La mer à la montagne
La montagne à la mer
La fin de la douleur
Les journaux en couleur
Tous les enfants contents
Et tant de trucs encore
Qui dorment dans les crânes
Des géniaux ingénieurs
Des jardiniers joviaux
Des soucieux socialistes
Des urbains urbanistes
Et des pensifs penseurs
Tant de choses à voir
A voir et à z-entendre
Tant de temps à attendre
A chercher dans le noir

Et moi je vois la fin
Qui grouille et qui s’amène
Avec sa gueule moche
Et qui m’ouvre ses bras
De grenouille bancroche

Je voudrais pas crever
Non monsieur non madame
Avant d’avoir tâté
Le goût qui me tourmente
Le goût qu’est le plus fort
Je voudrais pas crever
Avant d’avoir goûté
La saveur de la mort…

  

Je voudrais pas crever par Serge Reggiani : https://www.youtube.com/watch?v=Rz3A4bUaERw

Je voudrais pas crever par Edouard Baer : https://www.youtube.com/watch?v=ukotz8rUHwE

∼∼∼∼∼

En octobre 2018, c’était… le début du voyage et le Sri Lanka.

 

1er octobre 2018 : La B.O. du voyage

 

3 octobre 2018 : Mes cheveux & moi (2)

 

5 octobre 2018 : Le tout premier jour

 

6 octobre 2018 : Kumari (article de la Petite Souris)

 

7 octobre 2018 : Ça pique trop ! (article du Marcass’)

 

8 octobre 2018 : Je me suis fait attaquer ! (article du Grand Lièvre)

 

10 octobre 2018 : Ayubowan Sri Lanka ! (Bienvenue au Sri Lanka)

 

11 octobre 2018 : Fini d’taffer comme un connard…

 

12 octobre 2018 : Du marc dans mon café

 

13 octobre : Premier arrêt : Sri Lanka

 

16 octobre : J’ai faim !

 

18 octobre : Kande a Sri Lanka (Manger au Sri Lanka)

 

20 octobre : Le petit-déjeuner au Sri Lanka

 

21 octobre : L’école au Sri Lanka (article de la Petite Souris)

 

22 octobre : Mange ton riz, y’a rien d’autre ! (Manger au Sri Lanka avec des enfants)

 

23 octobre : Sri Lanka façon guide

 

24 octobre : Les animaux du Sri Lanka (article collectif)

 

25 octobre : Smiling and warm… but so rude ! (Est-ce ainsi que les hommes vivent… au Sri Lanka ?)

 

26 octobre : You are gonna burn one down ! (Manger dans la rue au Sri Lanka)

 

27 octobre : You are not alone… (Les touristes & moi, épisode 1 : Sri Lanka)

 

28 octobre : Gihin ennam Sri Lanka ! (Au revoir Sri Lanka)

 

30 octobre : Bon anniversaire, Lilie !

 

31 octobre : Deuxième arrêt : Bali

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En octobre 2019, c’était… le saut dans le vide.

 

1er octobre 2019 : Il y a un an (article de Papa Écureuil)

 

5 octobre 2019 : Avant que vienne l’automne

 

11 octobre 2019 : Un coup de pelle dans la face

 

15 octobre 2019 : C’est quoi, le centre ?

 

22 octobre 2019 : Il y a un an… au Sri Lanka

 

28 octobre 2019 : Tranquille ?

 

31 octobre 2019 : Il y a un an… à Bali, Gili et Lombok

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En octobre 2020, c’était… le désenchantement.

 

1er octobre 2020 : Dépression de saison

 

8 octobre 2020 : My let-it-go running playlist

 

15 octobre 2020 : Être une femme, est-ce que c’est pourri ?

 

22 octobre 2020 : La couleur de tes murs

 

29 octobre 2020 : Pourquoi tu fumes ?

 

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Et vous, que vous inspire octobre ?

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