Le tout premier jour

Photo : Le Grand Lièvre au marché aux poissons de Négombo (Sri Lanka, octobre 2018).
Ouais, les gens gardent leur casque des fois. J’ai dit à Mickaël : « Tu vois, j’aurais pu l’emmener en fait. Mon casque. ». Mais bon, j’ai pas trop insisté, c’est sujet qui fâche…

 

1er octobre 2018.

Quand tu pars en voyage, il y a ce moment flottant d’« entre-deux », dont parle Michel Onfray dans son livre Théorie du voyage – Poétique de la géographie : tu as quitté chez toi mais tu n’es pas encore arrivé(e) à destination .
Tu n’as plus de repères autres que les mots d’anglais que tu parviens à capter et les plateaux-repas distribués dans l’avion à des heures improbables pour ton corps parce qu’entre deux fuseaux.

Dans cet énorme avion Emirates qui n’en finissait plus de se préparer pour le décollage, il y avait d’abord un steward adorable. Gentil et timide aussi, jeune, un peu gauche, qui m’a servi deux fois de suite du café. J’ai bien aimé. Surtout qu’on n’en avait plus chez nous, il nous manquait juste deux capsules… donc on est partis à 8h du matin (bon 8h25, ok, mais c’est parce qu’il me restait des trucs à faire, c’est pour ça) SANS CAFÉ.

Genre tu pars pour 11 mois 24/24 avec tes trois enfants, et t’as même pas avalé un café quoi.

 We are the superheroes.

(Je suis désolée, comme je l’ai déjà dit, et sauf exceptions 1 et 2, j’aime pas Queen. Je pouvais pas écrire ce que vous attendiez de… wait for it… championnesque.)
Mais je m’éloigne du steward là (quoique, Freddie Mercury, le steward, tout ça…). D’ailleurs, avec ma nouvelle tête, je m’éloigne des hommes de manière générale.

Qui sont des gros c… malpolis. Pas que les hommes, les femmes aussi. Dans l’avion. Ni merci ni merde, comme dit mounette.
Quand je pense que je tanne la Petite Souris pour qu’elle regarde le steward dans les yeux quand elle le remercie pour le coca au lieu de murmurer thank you en baissant la tête comme une timide qu’elle est. Mais au moins elle dit merci !!!

La Chinoise assise à côté de moi, laisse tomber. Je ne vous en parle même pas sinon je vais encore m’énerver.

© Lise Desportes // blog.liliaimelenougat.fr //

 

Sinon, quand tu es une femme, au crâne rasé de surcroît, entrer seule dans un smoking lounge de l’aéroport de Dubaï pour aller fumer est une expérience assez solitaire…
En même temps, les pièces confinées pour fumer c’est un peu le bout du bout de ta motivation de fumeuse. Encore que là, ça piquait pas trop les yeux mais il devait faire quelque chose comme 12 degrés dans la pièce. Tu fumes vite quoi, tu traînes pas.

Et puis après le deuxième avion, quand tu arrives enfin, c’est beaucoup d’émotions à fleur de peau. Pas forcément les plus agréables je veux dire.
Il y a toute la tension générée par l’inconnu, le jet lag, la fatigue du voyage, celle des presque 24 heures depuis que tu as claqué la porte de chez toi et celle des dernières nuits trop courtes que tu as accumulées. Beaucoup de fatigue.

Les babi aussi. Qui expriment leur fatigue comme des babi, pas avec des mots. Et donc c’est pas facile. Le côté spartiate de la chambre à l’arrivée : mais maman y’a pas de draps ? Pourquoi la douche elle est cassée ? Et les toilettes c’est trop dégoûtant beurk !

On le savait, les premiers jours c’est jamais facile. Eh ben voilà, on y est.
Avec mon anglais qui est devenu tellement balbutiant…
Genre je galère pour demander où est-ce qu’on peut acheter des tongs pour le Marcass’.  🙁

 

Le Marcass’ avec Rohitha au marché aux poissons de Négombo, le premier jour de notre arrivée au petit matin.

 

Et puis, dans tout ça, juste avant qu’on aille se coucher, alors que les babi sont déjà écroulés sur les lits sans draps, la sonnerie du réveil de mon téléphone pour l’école. 7h du matin.
J’ai oublié de la désactiver. Et c’est beau. C’est beau de l’entendre là, à l’aube de ce jour qui se lève quand nous on va dormir et vivre sur un autre rythme pendant presque une année…