Photo : Gena Rowlands dans le film « A woman under the influence », de John Cassavetes (1974). LE film.
C’est les vacances de printemps. Du printemps d’avril qui a fait comme s’il allait venir mais finalement au dernier moment il change d’avis. Il se casse. Et les vacances ça devait pas être maintenant, et puis on est reconfinés et tout est renversé.
Oublie l’idée d’un grand week-end à la mer comme des poumons supplémentaires, l’horizon c’est ta maison. Le froid qui, la pluie qui, et parle à ma main.
Faut pas me faire ça à moi. Après je ne sais plus où j’en suis, je m’enfuis, je fais n’importe quoi.
– Je voudrais aller au cinéma avec toi.
C’est ce que j’ai dit jeudi dernier à Mickaël quand il est descendu de sa tour de télétravail.
– Je vais prendre la première semaine de vacances avec les enfants pour être avec toi.
C’est ce qu’il m’a répondu.
En l’écrivant ici, je vois que le rapport n’est pas évident. Et pourtant. C’était la bonne réponse. La seule réponse dont j’avais besoin en ces temps de reconfinement avec enfants où les cinémas sont fermés parce qu’ils sont moins essentiels que les fleuristes et les coiffeurs. En plus dans le cinéma art et essai qu’on fréquente, des fois on est quand même six dans toute la salle, donc pour la contagion covid c’est vrai que c’est chaud de ouf.
On va m’objecter – et mon pote Fabien le premier – que c’est bien un petit malheur de bobo intello de couiner parce que son cinéma est fermé. Ouais bah… j’en peux plus moi des samedis soir confinés avec enfants à manger des pizzas industrielles dans le salon en regardant de la merde estampillée « films à voir en famille ». J’en peux plus, j’en peux plus, j’en peux plus !
J’EN PEUX PLUS !!!
Je veux qu’on me rende mes samedis soir d’avant, je veux aller au cinéma, sortir et voir mes amis, je veux rire et faire la fête et danser toute la nuit, je veux me recharger de cette énergie qui est nourrie de liens, d’échanges physiques « en vrai » avec ceux que j’aime, je veux vivre libre !
– Ouais mais en attendant… on est gros-jean comme devant !
C’est ce que Mickaël a dit, et j’ai tellement aimé ce moment !
J’ai tellement aimé qu’il m’apprenne cette expression que je ne connaissais pas et que j’entendais pour la première fois dans sa bouche comme une surprise, un nouveau goût.
Être gros-jean comme devant, c’est quand t’as trop cru que t’allais pouvoir partir quelques jours en vacances, et finalement allez biyou – comme on dit chez nous. (Tu peux aussi dire : dans l’cul Lulu, mais nous on évite rapport à Lulu.)
C’est ça, être gros-jean comme devant. Tu as espéré, imaginé, rêvé encore plus fort, puis tu te retrouves au point mort. Tu connais ce sentiment de solitude et d’isolement ?
Et pour tout ça, le cinéma aide. Le cinéma que j’aime.
J’ai retrouvé la liste de mon TOP 10 cinéma que j’avais faite avec Mickaël avant qu’on ait des enfants. À l’époque où on écumait assidûment, plusieurs fois par semaine de jour comme de nuit, les petites salles du Quartier-Latin : l’Action Écoles, le Grand Action, l’Action Christine, le Champo, la Filmothèque, le Saint-André-des-Arts, le Reflet Médicis… et la simple évocation de ces noms réveille tant de souvenirs heureux et de partages enflammés…
Un soir on a écrit chacun notre TOP 10, en secret, puis, sur une autre feuille, on a essayé de deviner celui de l’autre, et on a comparé. Je me souviens qu’on avait chacun fait trois erreurs. Et trois erreurs, ça fait sept bonnes réponses sur dix, alors quand même, ça se tient !
Aujourd’hui c’est assez édifiant de constater que nos TOP 10 cinéma n’ont pas évolué depuis 15 ans… Pourtant on a vu plein de films depuis, plusieurs centaines, il y en a eu d’autres que l’on a aimés l’un et l’autre, mais jamais autant que les vingt films de ces deux listes-là.
Je vous les propose donc, au cas où, si vous aussi vous passez maintenant plus de temps à chercher ce que vous allez regarder sur Netflix qu’à voir le film. 🙁
Avant-hier soir, Mickaël et moi on a re-re-re-regardé The Apartment, de Billy Wilder, qui est le numéro 9 de son TOP 10 et que j’adore aussi parce que Billy Wilder c’est du joyau brut de comédie. Et ça nous a fait tellement mais tellement de bien ! Mickaël a dit :
– C’était l’époque où on pensait qu’il faut des bons dialogues pour faire un bon film.
Et c’est tellement vrai ! Je ne dis pas que les films d’aujourd’hui c’est de la merde. C’est pas ça. Des fois il y en a des bien. Lost in Translation. Thelma et Louise. C.R.A.Z.Y. Loin du Paradis. Eternal sunshine of the spotless mind.
Là direct sans réfléchir je vous cite cinq films que j’aime en couleur. Donc récents. Tâchez de vous le rappeler lorsque vous prendrez connaissance de mon TOP 10 juste après… Ils sont ma caution je-suis-PAS-une-vieille. Avant de reconnaître quand même que le cinéma américain des années 50-70, donc surtout noir et blanc, c’est mon bonheur.
Cette époque où on croyait encore qu’il faut des bons dialogues pour faire un bon film. Un scénario travaillé. De l’intelligence, de l’humour, du rêve. Du love.
Tension sexuelle de guedin dans La Mort aux trousses (Alfred Hitchcock), 1959.
I don’t particularly like the book I’ve started… You know what I mean ?
C’est énorme ! Cette scène est énorme, je pourrais la voir mille fois ! (je l’ai possiblement déjà vue mille fois).
Franchement, j’ai beau chercher, je n’ai pas souvenir de scène de cinéma plus érotique (et en couleur 😉 ) que cette scène du train entre Cary Grant et Eva Marie Saint dans La Mort aux trousses, d’Hitchcock. Et c’était en 1959, la même année que Some like it hot (définitivement une bonne année) !
Je la partage avec vous pour vous donner envie de voir, ou revoir au plus vite, La Mort aux trousses en VO AVEC LES SOUS-TITRES (parce que moi non plus je ne regarde pas les films en VO sans sous-titres).
Allez, c’est parti.
Mon TOP 10 à moi
1. A woman under the influence (John Cassavetes), 1974
2. Some like it hot (Billy Wilder), 1959
3. Vacances romaines (William Wyler), 1953
4. The shop around the corner (Ernst Lubitsch), 1940
5. All about Eve (Joseph L. Mankiewicz), 1950
6. Into the wild (Sean Penn), 2007
7. The Big Lebowski (Joel et Ethan Coen), 1998
8. La vie est belle (Frank Capra), 1946
9. The Misfits (John Huston), 1961
10. Autant en emporte le vent (Victor Fleming), 1939
* Et mon bonus-plaisir-coupable-en-VF *
Dirty Dancing (la rchouma, même pas je cite le réalisateur !), 1987
Évidemment le film le plus récent de mon TOP 10, c’est Into the wild. Bon mais je vous avais prévenus ! Et puis j’en ai au moins un dans les années 2000, c’est pas si loin. Ça montre juste que ça fait longtemps que je n’ai pas été renversée par un film. Alors que tous ceux de la liste que je vous présente ici, je les ai vus et revus un sacré paquet de fois et c’est tant de plaisir et d’émotion à chaque fois…
Évidemment il n’y a pas de film français dans mon TOP 10. Mais comme dit Fred-ma-cops (qui a tout le temps raison comme Mickaël, d’ailleurs ils pensent tout le temps pareil, mais moi ça me fait rien vu que je suis pas du tout une jalouse) :
– Quand tu vois que le summum du mec sexy qu’on te vend dans un film français, c’est Mathieu Amalric, ça calme !
Évidemment sur mes dix films préférés, il y en a trois avec Marilyn Monroe (même si dans All about Eve, elle n’a qu’un tout petit rôle, elle débute, mais elle irradie de tout ce qu’elle est ♥). En plus, coïncidence, il se trouve que j’ai prévu de vous parler de Marilyn Monroe depuis des mois, depuis le début du mois de janvier précisément, dans un article sur le féminisme.
Mais cet article me pose trop question, il part dans tous les sens et je ne fais que le repousser. La semaine prochaine peut-être, je serai sans enfants donc normalement j’aurai du temps. Parce que sinon je peux parler de Marilyn, comme de tous les gens que j’aime, pendant des heures !
Le TOP 10 de Mickaël
1. Hana-Bi (Takeshi Kitano), 1997
2. Hard Boiled (John Woo), 1992
3. The Blade (Tsui Hark), 1995
4. La vie aquatique (Wes Anderson), 2003
5. Goyokin (Hideo Gosha), 1969
6. Reservoir Dogs (Quentin Tarantino), 1992
7. Sanjuro (Akira Kurosawa), 1962
8. Ghost in the Shell (Mamoru Oshii), 1995
9. The Apartment (Billy Wilder), 1960
10. The Big Lebowski (Joel et Ethan Coen), 1998
* Et son bonus-plaisir-coupable-en-VF *
Piège de cristal (John McTiernan), 1988
Évidemment sur ses dix films préférés, il y a six films asiatiques dont un d’animation et quatre que PERSONNE ne connaît… reste Hana-Bi, voilà !
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Et vous, votre top 10 cinéma ?
Allez, lâchez vos films préférés et prêtez-moi vos DVD, j’ai besoin de m’évader !