Photo : Le Grand Lièvre attend le Père-Noël. À dos de T-rex parce que les rennes c’est surfait…
Ce soir c’est la nuit de Noël.
Les enfants iront se coucher avec des étoiles dans les yeux et des espoirs fous au cœur.
Les adultes, ben c’est les adultes. On ira se coucher aussi sans doute.
Au début du mois, le Grand Lièvre (9 ans) a déclaré, à table, entre les poireaux vinaigrette et le crumble de brocolis aux noix de pécan :
– Mais maman, pourquoi tu mets toujours des noix, tu sais que j’aime pas ça !
– Y’a trop d’infos sur le Père-Noël maintenant. Y’a plus de magie.
Alors deux jours plus tard, on a décoré un sapin. Un vrai de vrai qu’on a acheté, qui a poussé dans la terre, avec des aiguilles et tout.
Pas comme il y a cinq ans, quand on en a fabriqué un avec des morceaux de bois.
Pas comme il y a quatre ans, quand on en a fabriqué un avec des morceaux de bois.
Pas comme il y a trois ans, quand on en a fabriqué un avec des morceaux de bois.
Pas comme il y a deux ans, quand on se baladait en tongs et maillot de bain en Nouvelle-Zélande et que Papa Écureuil fabriquait des guirlandes de sloups par amour pour moi.
Pas comme l’année dernière où on n’avait pas de sapin du tout.
– Pffff… On est les seuls enfants de l’école à pas avoir de sapin chez nous.
– De l’école ? Tu rigoles, on est les seuls enfants de France à pas avoir de sapin chez nous !
– Ça se trouve, on est les seuls enfants du monde même…
Les pauvres gosses. Ils égrenaient leurs malheurs, tous les trois serrés sur le lit du plus petit.
Et puis à Noël dernier, je me souviens très bien où on était et même que c’était le mardi soir de la dernière semaine d’école avant les vacances de Noël, ma cops Carole m’a dit des trucs qui m’ont fait réfléchir. Ma cops Carole qui m’a fait découvrir, il y a un mois, la chanson de Claudio Capéo avec laquelle j’ouvrais ma newsletter 70 # 22 novembre 2020.
Je vois peu Carole dans ma vie d’aujourd’hui, quelques fois par an seulement, mais elle a toujours des mots qui touchent juste et qui me restent. Auxquels je reviens pour y réfléchir. Peut-être parce qu’on est si différentes. Les amis sont parfois un bon miroir de ce qu’on n’a pas réparé en soi et qu’on doit encore travailler. Pour grandir.
Donc cette année, grâce à Carole (qui ne veut pas d’enfants et les miens ne savent pas ce qu’ils te doivent), on a un sapin. Un vrai sapin AVEC des guirlandes et des boules pendues dedans ET une guirlande électrique.
On prépare même des biscuits pour le Père-Noël avec la recette de la maîtresse s’te plaît. Et des biscuits aux croûtes de fromage que les enfants adorent avec la recette de ma cops Clea. C’est une idée du Marcass’ (7 ans).
– Au cas où il préfère les biscuits salés, le Père-No. On va lui en mettre deux au thym et deux avec du piment, au cas où, s’il aime bien.
Le premier week-end de décembre, après qu’elle a décoré le sapin avec ses frères, la Petite Souris (11 ans) a écrit une lettre au Père-Noël. Elle est trop bignonne. Elle fait super bien le job pour son dernier petit frère qui croit encore au Père-Noël (et qui est pourtant une grosse caille. Pas le Père-Noël, le petit frère. On dirait qu’il a grandi au milieu de la téci et qu’il a appris à parler avec Joey Starr. En tant que sa mère-la-pute, ça m’interroge salement sur ma façon de m’exprimer).
– Les garçons, vous avez des questions à poser au Père-Noël ?
demande bignonnement la Petite Souris.
Le Grand Lièvre s’esclaffe. « S’esclaffe », c’est pour vous la jouer polie mais si je ne me gribouillais pas, j’aurais écrit : le Grand Lièvre se tape une barre de rire. (Et après tu t’étonnes du niveau de langage de ton dernier enfant.)
Entre deux pouffements (se dit quand on pouffe, pas la pouffe), le Grand Lièvre tacle sa grande sœur :
– Tu veux lui demander quoi au vieux ?? S’il aime les épinards ?!
Quant au Marcass’, wesh ma caille, depuis tout petit il est fasciné par le Grand Nord. Rappelez-vous avant notre grand voyage comme il avait répondu à la question :
– Le pays où tu voudrais absolument aller ?
– Au Pôle-Nord, parce que j’aime bien la neige et mettre mes gants roses, et que c’est trop beau là-bas (t’as vu).
→ Pour lire toute l’interview et faire plus ample connaissance avec lui, c’est ici : Qui est le Marcass’ ?
Mais revenons à la lettre au Père-Noël. Le Marcass’ n’est pas du genre à s’embarrasser. Il va droit au but. Accent de caillera inclus.
– Vas-y Garance, demande au Père-No dans ta lettre si y’a des McDo au Pôle Nord !
Souvenez-vous de son immense déception le jour de Noël il y a deux ans, comment il était « trop zénervé » au matin du 25 décembre 2018, à Tauranga en Nouvelle-Zélande, quand nous avons trouvé le Domac portes closes…
→ Relire ici Le Père-Noël des Kiwis (avec, à la fin de l’article, la photo de trois enfants au bout de leur vie devant le McDo fermé).
La Petite Souris a déposé sa lettre au Père-Noël le soir dans la salle de bain, et le lendemain matin il y avait une réponse à la place ! J’ai trouvé ça trop bignon, j’ai chuchoté dans l’oreille de Papa Écureuil :
– C’est super ce que t’as fait, beillbê ! Bon, il y a quelques fautes mais t’as assuré pour l’écriture !
– Quoi ? Quelles fautes ? Quelle écriture ? De quoi tu parles ?!?
Eh ben en fait c’était pas lui, c’est la Petite Souris qui a géré jusqu’au bout. Toute seule. La lettre, la réponse à sa lettre, l’histoire qu’elle raconte à ses petits frères. Tu vois Wendy dans Peter Pan ?
« Une maman ? C’est quoi Wendy, une maman ? »
Souvent Papa Écureuil et moi on la charrie, on l’appelle Wendy, on plaisante avec ça. Mais en vrai c’est pas marrant.
Foutue Wendy. C’était quoi son problème à J. M. Barrie quand il l’a imaginée ? Sa blessure d’homme immature qui a besoin d’être bercé contre le sein de sa mère et rassuré qu’elle lui soit entièrement dévouée, docile et disponible pour lui à tout moment ?
La Petite Souris n’a pas encore 12 ans mais je travaille là-dessus sans relâche avec elle. Pour lui éviter de souffrir plus tard du syndrome de Wendy justement. Qu’elle ne fasse pas passer les besoins des autres systématiquement AVANT les siens. Qu’elle ne s’oublie pas, qu’elle ne perde pas de vue ce qui lui fait du bien à elle, ce dont elle a besoin, elle, pour être heureuse, elle. Activement, dans ce qu’elle s’autorise et se donne à elle-même, pas à travers son sacrifice à la satisfaction des besoins des autres.
Wendy, le besoin d’aimer (extrait de Peter Pan, Disney).
Mais toi qui va t’aimer, Wendy ? Qui va prendre soin de toi et te serrer dans ses bras ?
J’en profite pour vous prévenir que si vous êtes une femme, de surcroît une mère, si vous vous sentiez rejetée ou abandonnée quand vous étiez petite, ou si vous paniquez à l’idée de vous retrouver seule, vous présentez des facteurs de risques. Si si.
Attention si vous cherchez constamment à faire tout et tout bien pour les autres, attention si vous pensez que c’est en veillant à ce que votre entourage soit toujours satisfait que vous trouverez votre place et que vous serez aimée.
C’EST UN GROS MYTHO.
Vous ne serez pas plus aimée si vous sacrifiez vos désirs et vos besoins pour ceux des autres. Vous serez triste et vide et seule. Parce que vous n’êtes pas présente pour vous-même.
Ce que vous faites ne sera jamais assez, vous ne serez jamais assez, et vous culpabiliserez pour tout. Dans l’insatisfaction de ne pouvoir faire davantage, la peur que les autres s’éloignent de vous s’ils s’en rendent compte, et, pire que tout, la frustration que vous aurez vous-même générée de passer à côté d’un peter pan de votre vie, à côté de qui vous êtes vraiment. Au fond.
Sans parler de l’exemple de Wendy que vous transmettrez aux petites filles autour de vous qui va les écraser et les rendre poreuses et affectivement dépendantes à leur tour…
Je vous dis ça sans jugement et en toute humilité ; je poursuis ma réflexion personnelle à travers le voile opaque de mes contradictions. Je n’ai jamais été une totale Wendy mais je me rends compte, plus je lis (des livres comme Libérées, de Titiou Lecoq) et plus je m’observe avec détachement, que j’ai des pensées, des attitudes, des gestes, que ma fille et mes garçons intègrent par l’exemple comme étant « la normale » alors que ces pensées, ces attitudes, ces gestes, ne signent pas du tout l’équilibre des rapports hommes / femmes.
Pourquoi la Petite Souris a-t-elle, déjà, des tendances wendyesques ?
Quel modèle de femme, et de mère (au foyer), suis-je pour elle ?
Force est d’admettre que mes comportements ancrés dans les vieux schémas que je porte en héritage progressent moins vite que mon discours féministe ! J’y reviendrai sûrement dans un prochain article que je prépare sur le féminisme & moi.
Chassez la Wendy qui est en vous.
Soyez plus égoïste. Soignez-vous. Tout le monde ira mieux !
(Mais faites un sapin pour vos enfants quand même. Joyeux Noël, Carole ! 😉 )
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Et chez vous le Père-No, il va passer ou il est confiné ?
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