Le tout dernier jour

Photo : Mickaël et moi sur le site hindouiste de Prambanan (Java, juillet 2019).
Photo d’Odyssée Tamata.

 

Nous sommes à l’aéroport de Kuala Lumpur. J’écris assise par terre en tailleur, l’ordi posé devant moi sur un siège, dans la salle d’embarquement d’un avion Emirates à destination de Dubaï. En transit seulement, tout ce que j’ai appris sur Dubaï et les Émirats Arabes Unis ne m’a pas donné envie d’y rester plus longtemps. Rapport à ce que je hais les malls et que j’ai vu assez de niqabs cette semaine pour le reste de ma vie.

7h de vol, 2h de transit à Dubaï donc, puis de nouveau 7h de vol pour rentrer à la maison.
Ça fait bizarre.
On est contents pourtant, on sent qu’on est arrivés au bout du voyage.

Les babi ont besoin de retrouver leurs grands-parents, leurs cousins, et Mickaël et moi avons besoin d’être tous les deux, SANS EUX.

Éprouver le calme de la maison vide, marcher en forêt main dans la main, profiter de Paris désert au mois d’août, aller au cinéma voir un petit film indé, boire des rhums maison, et partir un petit week-end quelque part, juste tous les deux. Amsterdam peut-être, manger du nasi goreng – des fois que ça nous manquerait.

Nous sommes épuisés et heureux de rentrer. Mais ça fait bizarre.
Après tout ce temps, sortir de notre bulle à cinq, rentrer chez nous, retrouver les gens.

 

Même jour que la photo en tête d’article, le matin, sur le site bouddhiste de Borobudur (Java, juillet 2019).

 

Les articles que j’ai écrits pour le blog m’ont permis de fixer les vertiges de mon carnet de voyage, donner une forme à mes impressions, poser des mots sur mes émotions.

On ne retient jamais tout. On oublie beaucoup. Ce qu’il reste finalement, c’est ce qu’on a ressenti quand on a laissé le monde entrer en nous.

Je l’ai dit souvent depuis le tout premier jour de notre grande aventure : le voyage élargit les sens. À condition qu’on laisse nos armures et nos peurs de côté, à condition que l’on s’ouvre vraiment à l’inconnu, alors on sent et on entend plus vivement, on regarde et on voit plus intensément, on goûte et on touche avec plus d’attention.

Le corps entier est en éveil, avide de recevoir toutes ces nouvelles expériences.

Mais être aussi ouvert, poreux à tout, tout le temps, est très fatigant.
Et puis ça fait mal souvent. Parce qu’on reçoit les émotions de chacun et qu’on ne s’en protège plus, tout ce qu’on porte en nous de fragile est remué aussi.
Il faut maintenant réapprendre à se recouvrir.

 

Temple taoïste Kuan Yin Teng, à Georgetown sur l’île de Penang (Malaisie, août 2019).

 

Papa Écureuil pense que les carapaces sociales se reconstruisent d’elles-mêmes, dès lors qu’on reprend le rythme de notre vie quotidienne. Je ne sais pas. Quand j’y pense, je sens un souffle d’air dans mon ventre, et puis le vide. Je ne sais pas comment ce sera. Ce soir, demain, dans un mois. Comment je m’en sentirai.

Et les babi, quand ils retourneront à l’école. Est-ce que ce sera comme avant avec leurs copains, ou est-ce qu’ils se sentiront en décalage ?

On en parle ensemble. On les prépare à atterrir, si ce n’est en douceur, du moins en bonne connaissance des difficultés qu’ils peuvent rencontrer. On leur rappelle ce qui se fait et ce qui ne se fait pas, chez nous, en France.
Manger avec les doigts, se fourrer les doigts dans le nez, critiquer à voix haute ce qui nous choque parce qu’on est sûrs que personne ne comprend le français…

On parle aussi de tous les petits et grands bonheurs qu’ils se réjouissent de retrouver, dont un nombre non négligeable tourne autour de la nourriture !

 

Stand de radish cake au marché́ de Jonker Street à Malacca (Malaisie, juillet 2019). C’est très bon mais les babi n’en peuvent plus des restos de rue, et ce jour-là le Marcass’ était au bout de sa vie avec son otite.

 

Au fil de ces derniers jours, trois questions sont apparues auxquelles nous avons répondu chacun à notre tour.

1/. Quel est le mot qui te vient immédiatement à l’esprit quand tu penses au retour à la maison ?

2/. Quelle est la première chose que tu vas faire ?

3/. Que voudrais-tu manger ?
(Nourrir les babi de sorte qu’ils soient satisfaits semble l’équation irrésolue de notre voyage…)

 

Hier soir, j’ai pris en photo le pauvre sac en plastique Degrolard qu’on s’est trimballé tout le voyage, avec la boîte de Tic-Tac à l’anis que j’avais dans mon auto avant le départ et que j’ai embarquée dans l’avion le 1er octobre dernier. Il en reste quelques-uns… Je les distribuerai au décollage et à l’atterrissage tout à l’heure.

 

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   Le Marcass’

 

1/. Quel est le mot qui te vient immédiatement à l’esprit quand tu penses au retour à la maison ?
Zébrou, mon doudou zèbre que je vais retrouver. Surtout comme je suis triste d’avoir perdu William mon wombat.

2/. Quelle est la première chose que tu vas faire ?
Jouer à mon solitaire avec les grenouilles que Tata m’a offert pour mon anniversaire de mes cinq ans.

3/. Que voudrais-tu manger ?
Du camembert et du chocolat noir. Plusse des œufs Kinder Surprise en chocolat et des oursons guimauve en chocolat, même si les deux c’est du chocolat au lait. J’aime bien quand même.

 

Le Marcass’ croque une sorte de brioche au chocolat dans la jeep au retour du lever de soleil sur le Bromo (Java, juillet 2019). En arrière-plan tout flou, c’est la jeune guide indonésienne dont je vous parlais dans mon article précédent.

 

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Le Grand Lièvre

 

1/. Quel est le mot qui te vient immédiatement à l’esprit quand tu penses au retour à la maison ?
Doudou ! En premier, mon doudou Lapine que j’ai depuis que je suis né, et aussi Côte-de-Patte, Balsamique, Serpent, ma marionnette dragon et mon gri-gri chauve-souris.

2/. Quelle est la première chose que tu vas faire ?
Le soir, serrer mes doudous et surtout ma Lapine. Et le matin, aller lire One Piece dès que je me réveille.

3/. Que voudrais-tu manger ?
Du poulet rôti de mounette ou de mamie, ou celui qu’on achète à la ferme où les poulets courent dans l’herbe et que le Pap’ met sur la broche (quand ils sont morts).

 

Le Grand Lièvre pendant le check-in, quand on arrive un peu tard à l’hôtel. C’est un enfant qui dépense beaucoup d’énergie et qui a besoin de full de sommeil pour se recharger, comme on dit au Québec… (Île de Penang, Malaisie, juillet 2019).

 

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La Petite Souris

 

1/. Quel est le mot qui te vient immédiatement à l’esprit quand tu penses au retour à la maison ?
Immense joie ! Je suis tellement heureuse que j’ai peur de pleurer quand je vais voir mounette et tata qui vont venir nous chercher à l’aéroport…

2/. Quelle est la première chose que tu vas faire ?
Faire un gros câlin à mounette.

3/. Que voudrais-tu manger ?
Les œufs à la neige de mounette. Miam miam miam !

 

La Petite Souris dans un warung indonésien près du Borobudur. Et devant c’est Léo ! (Java, juillet 2019).

 

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 Papa Écureuil

 

1/. Quel est le mot qui te vient immédiatement à l’esprit quand tu penses au retour à la maison ?
Appréhension. Pas parce que j’ai peur du retour, j’ai confiance que ça va bien se passer, mais plutôt parce que c’est la fin du voyage. Comme la nostalgie que ce soit déjà fini…

2/. Quelle est la première chose que tu vas faire ?
Faire le tour de la maison, pièce par pièce, et extérieur compris (le jardin en fait !).

3/. Que voudrais-tu manger ?
Du bon pain au levain de chez Degrolard.

 

Papa Écureuil hier dans la piscine de l’hôtel à Penang.

 

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Maman Ourse

 

1/. Quel est le mot qui te vient immédiatement à l’esprit quand tu penses au retour à la maison ?
Bubbling, c’est le mot qui me vient. Alors que bon, c’est pas comme si j’étais bilingue en anglais, mais c’est le bruit que fait le mot dans ma tête. Bubbling, comme plein de petites bulles qui crépitent en moi et je ne sais pas comment elles vont sortir. Même de les ressentir, parfois ça me donne du bien et parfois ça me fait mal.

2/. Quelle est la première chose que tu vas faire ?
Appeler Alison en croisant les doigts pour qu’elle ne soit pas partie en vacances, et prendre rendez-vous avec elle pour un massage de deux heures de folie moi toute seule pendant que les babi seront en vacances avec mounette et leurs cousins.

3/. Que voudrais-tu manger ?
N’importe quoi sans une sauce par-dessus. Je ne sais pas, j’ai pas trop envie de manger en fait. J’attendrai l’hiver pour un pamplemousse peut-être. Un pamplemousse dont quelqu’un lèverait les suprêmes pour moi…

 

Au presque même moment que la photo précédente, hier à Penang. J’avais pas envie de mettre une photo de ma face avec mes cheveux qui ont trop repoussé et que je vais re-raser dès demain notre retour. Alors j’ai mis mes pieds. Avec l’empreinte de mes tongs que je chéris et que je voudrais garder toujours…

 

 

Et maintenant je vais prendre des vacances de blog. J’en ai besoin…
Je vais revoir certains d’entre vous en vrai aussi, et ça va être bien !  🙂

On se dit à la rentrée ?

 

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Je vous invite à profiter de cette trêve estivale pour lire les articles du blog qui vous auraient échappé cette année, et gribouiller les pensées qu’ils vous inspirent. Les commentaires restent ouverts à la fin de chaque article, même des plus anciens, et ils seront tous lus !