Photo : Quelqu’un m’a fait parvenir cette photo sur WhatsApp le 20 mars dernier. Je ne l’ai partagée avec personne depuis mais j’en peux plus de la garder pour moi seule, elle est comme une grenade dégoupillée sous mon s(e)aint… Alors je la lance enfin, à tous mes amis cathos mais pas qu’eux… C’est une relique qui touche qui elle veut.
https://www.youtube.com/watch?v=yI1-Azh-t48
Casey, Apprends à t’taire, album « Libérez la bête », 2010.
https://www.youtube.com/watch?v=ZVdbO00y_zs
Casey, Chez moi, album « Tragédie d’une trajectoire », 2006.
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Salut les abonnés !
Aujourd’hui je partage avec vous deux chansons de Casey que j’adore.
Attention, c’est du rap sans concession. Brut, exigeant et malpoli, pas du genre à entrer un jour au Top 50…
La meuf est vénère. Et ça me va bien parce que moi aussi je suis vénère. Combien de fois je l’ai dit ça, combien de fois je l’ai pensé : apprends à écrire s’te plaît, ou apprends à t’taire ?
Ses textes à elle sont finement ciselés – et étudiés dans les grandes écoles, notamment à l’ENS soit dit en passant – parce que c’est ça le bon rap (on parle pas des minettes de R’n’B ici).
À force que j’écoute Casey, tout le monde chez moi est devenu fan. À part Garance qui trouve qu’elle est « trop en colère ». Comme si on n’avait pas de quoi être en colère.
« Alors attaque tout doucement, commence par le Scrabble. »
C’est trop bon, j’adore ! Mickaël aussi. Il se marre. Sur la deuxième chanson que je vous propose, il demande :
- Mais c’est quoi du shrub ?
J’ai cherché sur Internet. D’abord, si on veut pas apprendre à s’taire, on écrit Shrubb. Et le Shrubb, c’est du rhum arrangé maison, comme celui que fait Mickaël, sauf qu’à la place du gingembre, des arachides, de l’ananas ou du citron vert, c’est avec des écorces d’oranges macérées.
Je vais essayer, il a dit.
Et en attendant ?
En attendant, eh ben j’attends.
Il y a deux trois semaines, quand je vous ai envoyé ma dernière newsletter, s’était levé en moi l’espoir de pouvoir sortir sans autorisation, un embryon de liberté, une petite lumière, et puis de nouveau me pèsent l’abattement du confinement, le manque d’entrain pour mon quotidien, la lassitude de courir en étoile de 2 km autour de ma maison au nord, puis au nord-ouest, puis à l’ouest, au sud-ouest, au sud, au sud-est, puis à l’est, enfin bon, vous avez compris.
Je sais que c’est 1 km légalement. On vit un temps où c’est si facile d’être hors-la-loi…
Tiens, écoute Casey encore, dans l’épisode 66 du podcast « La Poudre » (20 février 2020).
« La liberté c’est du combat […] ça vient pas en demandant gentiment, ça vient pas en suppliant, ça vient en jouant des coudes. »
Les jours se répètent, les mêmes gestes, les mêmes heures, et moi je ne goûte pas du tout la douceur de la routine. Je voudrais bien pourtant, des fois. Rester tranquille paisible, coudre des rideaux, profiter des choses simples je sais pas quoi.
Mais. J’arrive. Pas.
La routine ne m’endort pas, elle me hérisse de toute sa mollesse, elle me stresse.
Quand les jours se ressemblent et ne font que s’ajouter les uns aux autres, je sens monter cette vague d’anxiété souterraine que je connais par cœur qui commence à m’agiter. Je trépigne, je bouillonne, mais je retiens et je soigne avec le rhum comme la tristesse, les coupures et les angines chez Casey pour pas que ça me dévore toute crue.
Même si. Quand même, ça déborde de l’enveloppe.
Pour vous donner une image, c’est comme si tout était calme autour de moi, la rue déserte, je marche, et à l’intérieur de mon corps je porte une bombe à retardement mais je ne vois pas combien de temps il reste avant l’explosion. Jack Bauer un peu, si tu veux. Avec moins de cheveux parce que je suis de nouveau rasée. Vas-y, clique là en dessous !
http://letsgofishing.fr/alarme-classique-iphone/
Bip bip bip bip bip.
- P****N ! T’es obligée de mettre l’alarme qui se déclenche au moment où Jack Bauer vient d’entrer dans un entrepôt bourré d’explosifs ? Et surtout, t’es obligée de la mettre SI FORT ??
A demandé Mickaël quand il a fait un bond de trois mètres en entendant mon réveil un dimanche matin à l’aube.
C’était il y a quelques semaines, quand on n’avait plus le droit de courir après 10 h dans mon département classé rouge et qu’il fallait y aller tôt le matin (ou après 19 h).
D’ailleurs c’est tout bizarre de vous faire partager ma sonnerie ici. On dirait que vous vous réveillez à côté de moi dans le lit ! ;-)
Heureusement ça n’a pas duré (le hors-la-loi 10h-19h).
Je vous passe les remarques acides de celui qui se réveille VRAIMENT à côté de moi dans le lit, du genre :
- Ah ouais, ah ça pour aller courir tu te lèves ! Par contre quand il s’agit de l’école…
Il n’a pas terminé sa phrase. Mais c’était pas la peine parce que je savais exactement à quoi elle renvoyait. Ça va que c’était moyennement acide. Tendrement humoristico-acidulé, disons.
Parce que la vérité vraie c’est que, avant cette interdiction de courir après 10 h du 7 avril 2020, je n’avais plus remis de réveil depuis le 1er octobre 2018, quand j’avais oublié de le désactiver, au tout premier jour de notre grand voyage.
Ça ne veut pas dire que je ne me lève pas le matin pour emmener mes enfants à l’école, hein. J’ai déjà des problèmes avec la CAF, n’en ajoutons pas.
Ça veut dire que notre voyage en famille a changé notre façon de voir les choses et de vivre ensemble, et que, depuis notre retour, Mickaël ne part plus aussi tôt au travail. S’il programme bien son réveil à sonner tous les jours (et moins fort que le mien), il prend désormais le temps de nous réveiller lui-même physiquement les babi et moi. Il râle avec moi mais il aime ça.
Hier soir, il m’a demandé :
- C’est quoi du shrub ? Qui tu voudrais voir le premier week-end du déconfinement ?
Mais là je ne pouvais pas chercher sur Internet, ni dans mon dictionnaire que j’aime tant. Et je n’ai pas su répondre. Comme une angoisse.
Bip bip bip bip bip.
Je vous souhaite un bon avant-dernier dimanche confiné.
Tranquille et paisible, comme moi.
Audrey
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