Manger en Grèce AVEC ARNAUD !

Photo : C’est lui, c’est mon pote Arnaud. Chouette soirée à Artémonas (Sifnos, août 2020).

 

Sur une idée de Papa Écureuil.

– J’ai bien aimé ton article sur la cuisine grecque, mon amour. Pourquoi tu ferais pas un article sur le off de nos repas ? Ça s’appellerait « Manger en Grèce avec Arnaud ».

Dont acte. Voici le journal du off de nos vacances en Grèce avec Arnaud & Maud, Loulou et Malou. Du off de la cuisine, j’entends. Pour le reste, ce qui se passe à Sifnos reste à Sifnos. Abdos dans l’eau, concours de roues, maillots Eres, avions de chasse, babychopeurs et craquages de la nuit. Les yeux qui rient de Dimitri. Les règles du Uno. Chut. Ça passe crème…

Pour vous donner un peu de contexte, mon pote Arnaud c’est le mec, tu vas dîner chez lui, quelqu’un demande un jus de pamplemousse pour l’apéro (clairement c’est pas moi), il sort un pomelo de son frigo et il le presse à la main devant toi. Le blond quoi.

Ce jour-là, il y a tellement d’années que j’étais même pas une maman, j’ai su au fond de moi que, quoi qu’il arrive après ça, j’aurais toujours respect et admiration pour Arnaud.

 

Et donc le off. D’abord, dans la vraie vie, c’est Maud qui cuisine. Merveilleusement.
Elle prépare les barbajuans de Menton, la région de ses vacances d’enfant, t’as pas idée.
Elle s’adapte sans barguigner, avec le sourire et une grande créativité, quand tu fais chier avec ta cure de détox pendant deux mois chaque automne, sans sucres, sans produits laitiers, sans viandes (sans café, sans alcool, sans chocolat). Un soir elle te sert la salade de pousses d’épinards, dattes et amandes d’Ottolenghi. Je te jure, c’est vrai. Pour toi. Tu penses à l’épouser tellement c’est bon. Ah non tu peux pas, t’es déjà mariée. Bon bah témoin alors. Voilà, tu vas être son témoin (newsletter 44 # 15 septembre 2019).

(Je sais, j’arrête pas de me la raconter avec cette histoire, les babi me l’ont déjà dit, mais c’est parce que je me sens très fière et très honorée.  😉 )

 

J’adore cette photo et c’est moi qui l’ai prise (Vathi, août 2020) ! Jusqu’au dernier moment j’ai cru que Maud allait me dire non pour la publier. Vous ne savez pas la chance que vous avez.

 

Maud est célébrée dans notre groupe d’amis depuis le lycée pour son tiramisù – c’est pourquoi je m’applique à précisément ne JAMAIS lui demander de tiramisù. Pourtant, Maud ça ne la dérange pas, elle s’exécute avec le même sourire dont j’ai déjà parlé parce que ça lui fait plaisir de faire plaisir. Mais moi je suis loin du calme et de la sagesse de Maud, j’aurais envie de buter quelqu’un si on me demandait de faire toujours la même putain de chose.

Houhou les gens, vous croyez que j’ai réussi un truc dans ma vie et que je kiffe le reproduire à l’identique ad vitam æternam en n’introduisant jamais la moindre variante, le moindre soupçon de risque ??

C’est négliger le talent de Maud, voire son audace. Oui, absolument.
C’est oublier qu’elle réalise une dacquoise pistache / chocolat exceptionnelle et les meilleures profiteroles que j’aie jamais mangées de ma vie.
Bien sûr pour tout ça, faut pas être en cure de détox faut aimer le chocolat. Et Maud aime le chocolat. D’amour. De très très grand amour. Comme Achille avec Patrocle un peu. Si tu veux.

 

Mickaël lit derrière moi pendant que j’écris. Il dit :

– Tu devais pas écrire un article sur Arnaud ?
– Si, pourquoi ?
– Non, comme ça. Parce qu’on dirait plutôt une ode à Maud là…

C’est vrai. Je vais me recentrer. Mais quand même, les profiteroles de Maud.

 

Je me recentre. Ici c’est Mickaël & moi avec Arnaud & Maud à Kastro (Sifnos, août 2020). Une photo prise par Louise D.-V. (merci Loulou  🙂 ).

 

Et donc le off (deuxième essai).

Si j’entends Jamiroquai, je pense à Arnaud.
Quand je prépare du poulet à l’estragon ou n’importe quoi à l’estragon, je pense à Arnaud.
À chaque fois que j’achète de la rhubarbe, je pense à Arnaud.
S’il n’y a plus de pain et que j’ai peur que ça manque à quelqu’un, je pense à Arnaud.
Quand je teste une nouvelle recette de biscuits salés trop bons pour l’apéro, je pense à Arnaud.
À chaque fois que je dois faire une prise de sang, je pense à Arnaud.

Tout ceci est sans aucun rapport avec le off de nos repas en Grèce mais j’avais envie de le dire. Parce que comme j’ai « un quotidien avec des problèmes du quotidien » (une réflexion puissante d’Arnaud), je pense souvent à Arnaud.

Et quand dans mon esprit je pense à lui, instantanément je le vois en train de taper un rythme avec ses mains. Vous savez quand vous pensez à quelqu’un, c’est toujours une certaine image qui vous vient. Par exemple si je pense à ma copine Adeline, je la vois avec son bonnet, même si on est au mois de juillet. Le bonnet fait partie d’elle désormais comme, je sais pas, son poignet.

Où j’en étais ? Ah oui, le off.

Pendant les vacances, si c’est vraiment des vacances, chez Arnaud & Maud comme chez nous, c’est Arnaud et Mickaël qui cuisinent. Enfin pas ensemble mais tu vois ce que je veux dire ? – comme disent certaines. Pas Maud, pas moi. On ne dit pas ça. Et on ne cuisine pas pendant les vacances. Surtout pas à Vathi. La cuisine ça suffit.

Quand nous sommes arrivés à Sifnos, Mickaël & moi et nos trois enfants, nos amis nous ont accueillis avec un déj’ de bienvenue préparé (donc) par Arnaud. Une salade grecque comme il se devait. Délicieuse.

Arnaud a lancé le concept de greek salad bar qui a tant plu aux enfants : je prépare tous les ingrédients dans des petits bols (en céramique de Sifnos, c’est mieux) et chacun dresse son assiette comme il veut. Ça marche super, je vous le recommande avec vos enfants. C’est ludique et plein de couleurs, ils mangent des câpres et des oignons rouges crus alors que quand tu les mélanges avec le reste dans un saladier, ils trient tout et ils les laissent sur le bord.
Va comprendre.

 

L’assiette de bienvenue d’Arnaud. Salade grecque façon dakos (parce qu’il y a dedans le paximadi, une sorte de petite biscotte très épaisse et très dure à la farine d’orge qu’il faut imbiber d’huile d’olive pour pouvoir la croquer). Avec le fromage frais de chèvre artisanal de Sifnos et les produits de l’île.

 

Avant de partir en Grèce déjà, je songeais à nos deux semaines de vacances communes et cultivais en secret l’espoir de goûter les fameuses « pâtes à la Nono » que Maud a si souvent acclamées. Mais cet espoir a été piétiné je ne sais même plus à cause de quoi. Et si j’en ai oublié la raison, c’est parce qu’il y a eu pire que ça. Il y a eu, ou devrais-je dire, il n’y a PAS eu : le croque-mademoiselle.

Le croque-mademoiselle qu’Arnaud prépare au petit-déjeuner tous les matins de vacances pour ses deux filles. Ses deux filles et, ça aurait pu, ça aurait dû, moi.

Ce croque-mademoiselle est l’élément discordant dans le long roman d’amitié que je vous ai un peu raconté (juste un peu).

Imagine qu’un ami proche, que tu aimes très fort, te fait rêver d’un truc spécial, un croque-mademoiselle rien que pour toi, un matin, parce que c’est TOI et personne d’autre, et au moment où tu es sûre que tu vas l’avoir, on te l’arrache : brusquement c’est non. Tu es pétrifiée comme un enfant à qui on a pris son jouet.
Alors on te promet pour le lendemain, ton désir monte encore, il devient obsession, et puis non. Non non non. Ça ne se fera pas.

Tu traverses un à un les affres de la déception, du refus d’y croire au dépit, en passant par la colère, le manque insupportable qui te rend dingue, la frustration profonde qui va peupler tes nuits d’autant de croques-mademoiselles inaccessibles.

 

Le croque-mademoiselle de Loulou à Sifnos. Ou peut-être celui de Malou. Non seulement j’ai pas eu mon croque-mademoiselle mais en plus on m’envoie une photo le matin en direct de terrasse à terrasse pour me faire crever d’envie. Non mais QUI fait ça ??

 

Voilà où j’en suis.
Au jour d’aujourd’hui je n’ai toujours pas eu mon croque-mademoiselle.
J’ai arrêté de réclamer à l’étape avant de supplier – plutôt crever de faim.

Et cet ami se prétend un ami ? Mais dites-moi, quel genre d’ami(e) ferait ça ?
Quel genre d’ami(e) peut soulever une telle faim en toi et t’abandonner ensuite ardente, avec rien d’autre qu’un caillou à mettre dans ta soupe comme le vieux loup solitaire ?
C’est la nuit, c’est l’hiver.

Quel genre d’ami(e) ose encore le week-end dernier, après la rentrée, remuer le couteau dans une plaie qui n’est pas refermée et t’écrire ces mots (je recopie texto) :

– La frustration c’est l’école du bonheur.

Ça fait mal, hein ? L’école du bonheur… L’école… Pfff.
J’ai riposté par un dessin sur mon téléphone que je ne peux pas reproduire ici et qui représente une main de face avec tous les doigts repliés sauf le grand du milieu. Puis j’ai préparé moi-même la soupe de pois chiches typique du dimanche soir à Sifnos et je l’ai prise en photo exprès pour montrer à Arnaud moi aussi. Tiens, dans ta face !

 

Voici la photo que j’ai envoyée à Arnaud dimanche soir après la rentrée : ma soupe de pois chiches à moi, d’inspiration sifnosienne. Avec une spanakopita maison au fond.

 

Mais Arnaud m’a répondu :

– Super ! Donc tu apportes l’entrée la prochaine fois que vous venez dîner à la maison ?…

À terre j’étais. Moi je voulais juste pleurer sur ma plaie, le croque-mademoiselle qu’on m’a fait scintiller et qui m’a été arraché.
Il faut croire que la vengeance ne marche pas quand on aime. (Ça pourrait être une maxime d’Arnaud. Je vais voir avec lui.)

 

Le dimanche soir à Vathi, quand Arnaud accommode la révithada du Tsikali avec du riz. Dans l’appart’ que nous louons, c’est la pièce principale, la cuisine avec les trois lits des babi. Les adultes dînent sur la terrasse tranquilles, sans bruit…

 

Et pour boire, me direz-vous ? Si on veut pas de jus de pamplemousse fraîchement pressé ?
Normalement, avec Arnaud vient la caïpiroschka. Mais pas là. Non pas là.

Je cherchais un accord mets et musique comme dans les recettes de Chef Simon. Mais c’était pas ma cuisine (parce que j’étais EN VACANCES !), donc j’ai pas le feeling.
Arnaud est avant tout un batteur. Tu reconnais les batteurs au fait qu’ils tapent tout le temps avec leurs mains, n’importe où, n’importe quand et sur n’importe quoi. La table devant laquelle ils sont assis, leurs genoux, leurs cuisses, ta tête si elle passe par là. Ça peut être très agaçant. Ça dépend du batteur. Avec Arnaud, ça va.
J’essaye d’oublier cette blessure terrible du croque-mademoiselle, et ça va.

Donc en Grèce, Arnaud fait un accord mets et bière à la Mythos, et il te gratifie de temps à autre d’une pensée percutante que tu t’empresses de noter sur ton carnet. Je vous en ai déjà livrées quelques-unes ça et et à d’autres endroits sur le blog – si vous tapez « Arnaud » dans la barre de recherches du blog, vous allez bien retrouver les articles qui en parlent.

À Sifnos, j’ai eu la grâce de méditer sur :

– J’ai toujours fumé en fumant.

(Dit le mec qui a arrêté de fumer il y a au moins dix ans.)

 

Arnaud sous le firmament de la colline de Vathi, après la rando du soir jusqu’au monastère (Sifnos, août 2020).

 

*****

 

Et vous, avez-vous un ami cuisinier ET philosophe que vous voudriez me présenter ?
Quelqu’un qui donne sans reprendre ?

 

 

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