Quatorzième arrêt : Java

Photo : Temples hindouistes de Prambanan, sur l’île de Java (juillet 2019).

 

L’Indonésie est le plus grand archipel du monde avec 18 306 îles (dont 6 000 inhabitées qui ne portent même pas de nom) disséminées sur plus de 5 000 km d’est en ouest et presque 2 000 km du nord au sud.
C’est aussi le 4e pays le plus peuplé du monde (70% des Indonésiens vivent sur l’île de Java où se trouve Jakarta, la capitale), et le premier pays musulman du monde.

La croissance économique du pays augmente régulièrement, ainsi que le niveau de vie moyen, mais 29 millions d’Indonésiens survivent toujours sous le seuil de pauvreté.

Du côté des libertés fondamentales, on ne peut pas dire que les droits de l’homme progressent à la même rapidité que l’économie… voire ils régressent !

L’Indonésie était autrefois réputée pour sa modération religieuse : l’islam, le christianisme, le protestantisme, le bouddhisme, l’hindouisme et le confucianisme se côtoyaient globalement sans heurts.

La Constitution indonésienne garantit même (sur le papier) l’égalité entre ces six religions.
Je ne sais pas pourquoi mais j’ai envie de préciser ici que si le voile islamique est obligatoire dans les écoles musulmanes, il n’est pas autorisé dans les écoles publiques.

 

École coranique à Yogyakarta (sur l’île de Java).

 

Mais depuis une vingtaine d’années, l’Indonésie subit la montée de l’intolérance religieuse.

D’abord, il est interdit d’être athée, de se marier civilement, ou de se marier avec quelqu’un d’une autre religion.

Ensuite, les agressions physiques à l’encontre des communautés shia, chrétienne ou ahmadie (musulmans chiites), qui sont la plupart du temps commises par des sunnites radicaux, se multiplient en toute impunité, tandis que les lois sur le blasphème religieux sont appliquées sévèrement.

En mai 2017, l’ancien gouverneur de Jakarta, « Ahok », qui avait cité un verset du Coran dans le but d’inciter les électeurs à ne pas intégrer la religion dans leurs choix électoraux, a été condamné à deux ans de prison pour blasphème.

Enfin, la radicalisation de l’islam s’accompagne de mesures de plus en plus coercitives à l’encontre des homosexuels : châtiments corporels, sites bloqués, manifestations interdites, détentions abusives…

 

Entrée d’une rue à Yogyakarta (sur l’île de Java). L’aigle Garuda, emblème national de l’Indonésie, porte dans ses serres la devise nationale du pays : Bhinneka tunggal ika, qui signifie « Unité dans la diversité »…

 

Et puis l’environnement n’est pas une préoccupation nationale.

J’ai déjà parlé des décharges à ciel ouvert que j’ai vues à Bali et à Lombok. Mais il n’y a pas que les ordures. Il y a la destruction du corail et le massacre des napoléons (poissons protecteurs du corail sous-marin qui se vendent cher parce que la chair est très appréciée par certains), le trafic d’animaux (oiseaux rares, tortues, singes, crocodiles…) et la déforestation massive.

Entre 2000 et 2012, l’Indonésie a détruit six millions d’hectares de forêt, soit l’équivalent du territoire de l’Irlande !

Les arguments écologiques n’ont aucun poids face aux intérêts économiques du lobby des producteurs d’huile de palme qui provoquent de gigantesques incendies pour renouveler leur surface d’exploitation. Ces feux sont déjà une catastrophe en soi pour l’écosystème forestier, mais ils dégagent en plus des nuages toxiques qui touchent habitants et espèces animales protégées. Bien sûr cette pollution atmosphérique ne s’arrête pas aux frontières de l’Indonésie ; elle est poussée par les vents jusqu’en Malaisie, aux Philippines et en Thaïlande.

 

Arbres de la place Alun Alun Kidul à Yogyakarta (sur l’île de Java). Photo de Gabriel Soucy.
 
La carte

 

 
La minute de Ted Mosby

Note : Les informations que je vous donne ici concernent toute l’Indonésie, pas seulement l’île de Java.
Si c’est plutôt l’île de Bali qui vous intéresse, lire Deuxième arrêt : Bali.

 

  • Superficie : 1 904 570 km² (soit presque quatre fois la France).
  • Population : 260 600 000 habitants.
  • Langue : bahasa indonesia (langue officielle dans toute l’Indonésie), proche du bahasa malaysia.
  • Religion : islam sunnite (87%), minorités chrétiennes (10%), bouddhistes et animistes.
    → À 93% hindouiste, Bali est l’exception indonésienne.
  • Régime politique : république présidentielle.
  • Chef de l’État : Joko Widodo (depuis 2014).
  • Capitale de toute l’Indonésie : Jakarta, sur l’île de Java (plus de 10 millions d’habitants).
  • Autres grandes villes : Yogyakarta (Java), Surabaya (Java), Medan (Sumatra), Macassar (Sulawesi), Denpasar (Bali).
  • Monnaie : roupie indonésienne ou rupiah (Rps).
    1 € = 15 000 Rps.
    Pour voir une photo de la monnaie indonésienne, lire ici.

 

Drapeau de l’Indonésie.

 

  • Climat : tropical. La saison sèche s’étend de mai à septembre, et la saison des pluies d’octobre à avril.
  • Paysage : diversifié entre forêts (quoique… lire mon introduction plus haut), mer, prairies, montagnes, volcans.
  • Principales cultures : bois, riz, fruits, café, textile (batik).
  • Site inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco (pour Java) :

Temple bouddhique de Borobudur, temples hindouistes de Prambanan, site des premiers hommes de Sangiran, Parc National d’Ujung Kulon.
Reconnu au Patrimoine oral et immatériel de l’Humanité, le wayang est un spectacle de marionnettes très populaire, incontournable des fêtes traditionnelles indonésiennes.

 

Sur le site de Borobudur, à Java. Le plus grand ensemble bouddhique au monde.

 

  • Conduite : Volant à droite, conduite à gauche. Pas trop de signalisation mais routes goudronnées correctes.
  • Emblème national : Garuda, l’aigle divin (monture de Vishnu).
    → On associe souvent l’aigle de Java, espèce actuellement menacée et symbole de l’Indonésie, à Garuda.
  • Devise nationale indonésienne : Bhinneka tunggal ika, ce qui signifie « Unité dans la diversité ».
  • Sport national : badminton.
  • Plat national : nasi goreng.
    Pour en savoir plus sur la cuisine javanaise, lire ici.
    Pour en savoir plus sur la cuisine balinaise et, plus généralement, indonésienne, lire ici ou .
    Et pour en savoir plus sur les fruits sous les tropiques, c’est ici !

 

Nasi goreng, le plat national indonésien : du riz frit avec des oignons, des légumes, quelques petits morceaux de poulet, et un œuf au plat par-dessus.
 
Javanais célèbres

De même qu’en arrivant à Hong Kong, j’avais Hong Kong Star dans la tête, j’atterris à Yogyakarta avec à la bouche La Javanaise, de Serge Gainsbourg. J’aime beaucoup certaines chansons de Gainsbourg, La nostalgie camarade, Par hasard et pas rasé, et d’autres. Mais j’ai jamais aimé La Javanaise. Pourtant, je découvre aujourd’hui avec une curiosité enthousiaste l’origine de cette chanson et de ces allitérations en folie et mon amour de la langue bondit d’excitation !

On peut aimer ou pas Gainsbourg, mais on ne peut pas dire que c’est pas un poète ou quelqu’un qui ne sait pas écrire !

Parce que, je viens de l’apprendre en faisant mes recherches, mais le javanais qui donne son titre à la chanson est un argot de la deuxième moitié du XIXe siècle, aussi appelé « langue de feu », qui est encore plus incompréhensible que le louchébem ! Et il est néanmoins manié brillamment dans la chanson que Gainsbourg a écrite pour Juliette Gréco (je vous ai déjà parlé de la perfection du sourcil sinon ?)

 

Piste audio : Serge Gainsbourg, La Javanaise, 1963.

 

Il y a aussi la java de L’Accordéoniste d’Édith Piaf et La Java des bombes atomiques de Boris Vian, dans le sens de : java, la danse des bals-musettes de la première moitié du XXe siècle. D’où est tirée l’expression « faire la java » (et non la javotte) pour faire la fête, lâcher tout. On dit aussi « partir en java », qui ne signifie pas partir en sucette mais ici encore : faire la bringue.
En français d’Afrique, on dirait s’ambiancer, si vous préférez.

Enfin, si vous « connaissez la java », on ne risque pas de vous la faire à l’envers…

 

Piste audio : Édith Piaf, L’accordéoniste, 1940.

 

Au-delà de ces fantastiques découvertes de la langue française, je n’ai pas trouvé de Javanais célèbres, mais une presque Javanaise : Mata Hari, qui signifie « soleil » en bahasa indonesia.

En vrai, Mata Hari était néerlandaise, mais puisqu’elle s’est inventée des origines et un nom javanais, je me sens autorisée à en parler dans les personnalités de l’île de Java. C’est une femme inspirante, à la fois danseuse, aventurière, espionne, qui a fait preuve d’une grande liberté et de courage dans sa façon d’assumer sa nudité et une vie sexuelle riche à une époque plutôt rigoriste (début XXe siècle).

 

Mata Hari à 34 ans, en 1910.
 
Quelques mots en bahasa indonesia

bienvenue : selamat datang (ou, plus simplement, datang)
bonjour : selamat pagi (ou juste pagi)
comment ça va : apa kabar
je vais bien : baik-baik
au revoir : selamat tinggal (ou juste tinggal)
d’accord : beres
oui : ya
non : tidak
s’il vous plaît : tolong
merci : terima kasih (on prononce « terima cassi », et en dialecte balinais, on dit suksma)
pardon : maaf
c’est combien : berapa hargannya
manger : makan
c’est bon : itu lezat
boire : minoum
eau : air (on prononce « aïr »)
tchin tchin (santé !, à la vôtre, ou whatever) : selamat minoum

 

Marchande de fruits et légumes au marché Pasar Beringharjo de Yogyakarta (sur l’île de Java). Photo d’Édith Sénéchal.

 

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Et vous, que savez-vous de Java et de l’Indonésie ?